esthétique de réseau

En ce temps-là comme en tout temps, on appréciait quelque chose parce que le goût commun était de l'apprécier.  Même les plus sociopathes des individus n'eussent pas fait autrement : mais leur société eût été celle d'autres époques, ou d'auteurs choisis.  

§.2  Ainsi donc, on aimait collectivement, ce qui en soi n'est pas nouveau.  Le neuf, en revanche, était de le clamer à grand voix sur le Réseau des réseaux, Internet, le Web, comme on dira, mais aussi, le Réseau social.  Or, chacun apportait un grain de sable, mais ce qu'il en résultait était un désert...  On aurait aussi bien pu dire alors, que chacun pût retirer son grain de sable, et il n'y aurait plus eu de désert...  Mais non, en ces affaires, cela ne marche pas ainsi : chacun, sur le Réseau social, était prisonnier de son image, de l'ensemble des devoirs qu'il s'instituait vis-à-vis des autres.  Et, quand bien même vous aviseriez sainement ne pas vouloir utiliser tel gadget à la mode, si c'est un outil social, alors vous êtes obligé de l'utiliser, du simple fait que toutes vos connaissances font de même.  

§.3  C'est ainsi qu'en ce temps-là, l'humanité s'était faite esclave d'elle-même, de ne pas savoir assez se déprendre des avantages techniques.  À la rigueur, on eût pu convaincre individuellement chacun de ce postulat, que l'homme est encore relativement sensé seul, mais collectivement incroyablement lâche.  Mais à quoi bon, puisqu'il eût fallu un assentiment collectif, —— et que c'était justement ce qui ne pouvait advenir ?  

§.4  Escape disait quant à cela : « Il vous faut retrouver la dynamique des petits groupes, et le désir de ne pas se fondre dans un ensemble.  Il faut de nouveau oser être une note isolée, plutôt que de travailler à se fondre dans une symphonie qui n'est ici qu'un grand boucan.  Il faudrait, en toute rigueur, s'estimer mieux en soi que l'on ne se révèle, peut-être faussement! peut-être faussement! dans la relation... surtout dans la relation amplifiée... »

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