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§.2 L'Auteur alambiqué se tourne vers le maître du Roquet-de-la-critique et lui dit : « Quoique cet animal apprécie peu les poètes, je veux croire que tout n'est pas inaccessible à la poésie en lui... Son apologue comique du marteau de girofle démontre à l'évidence qu'un certain talent était en lui, qui ne demandait qu'à se développer... Mais, par ma foy, qu'il abandonne la viande rouge ! Son goût de la carne gâte son talent. Oui, il y a une autonomie du mot, de la parole, nous la rapportons à la puissance de la parole, qui s'appelle le Logos, ou le Verbe, notez l'usage de la majuscule. Les clous de girofle, en ce sens, ont leur portée, non pas absolue mais à tout le moins sans limites... Car prétendre qu'une expression rencontre un jour sa mort, c'est insulter la capacité créatrice... Même le Roquet doit se rendre compte que l'humanité n'a pas grandi sans un tuteur qui la soutenait : or, le Langage ne serait-il pas partie prenante de cette aide ? Ce Tutorat du Principe, ce Soutien de l'Origine Droite, qui le nierait, sinon le Roquet, dans un accès de rage ? Mais vous, éduquez-le mieux que cela. » §.3 Le maître du Roquet-de-la-critique se récusa en disant : « Je ne suis pas responsable de ce Roquet que vous m'associez, il aboie mais ses aboiements ne sont pas mon langage articulé. Selon ma vision des choses, la poésie est hors-jeu. Je le dis sans ambages, parce que hors la froide raison, qu'est-ce qui pourrait justifier l'homme ? Si vous affrontez cela, ne vous plaignez pas de provoquer l'envie de mordre... » §.4 L'Auteur alambiqué dit : « Vous croyez peut-être que la poésie consiste à dire des choses sans queue ni tête ou en recherchant des effets de manche plus ou moins théâtraux... Ou bien, un art futile de la contrainte obère votre acception de la chose. Vous vous faites une idée trop restrictive de la poésie. Elle n'est pas l'inepte bourgeoise que vous en faites, mais une servante au grand cœur et une incomparable reine. Cependant, vous ne voyez pas que le poète est le frère du roi et du prophète. Et vous échouez à intégrer la philosophie à cet ensemble. Puisque vous vivez dans une conception de l'univers qui n'est que débris, il n'y a rien d'étonnant à ce que vous ne preniez pas pour solide la maison d'autrui. »
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[Œuvre d'Escape, 1990-2015 (achevée, présentée au monde), auteur initial : Escape, France]. Copyleft : cette œuvre est libre, vous pouvez la copier, la diffuser et la modifier selon les termes de la Licence Art Libre http://www.artlibre.org |