la vérité du nihilisme

Si l'arbre a une saveur, c'est celle de ses fruits.  Voilà ce que pourrait être la morale d'un jardinier.  Ce ne serait pas forcément la morale d'un gastronome.  À quoi tend ceci ?  C'est que l'adepte du néantissime se ferme à lui-même toute issue, et c'est sa grandeur autant que sa misère.  Si toutefois le rien a une grandeur, si toutefois il a une misère.  Autre est la sagesse positive, celle qui ne se conclut pas par ces mots :

« Les êtres meurent ou naissent, se séparent ou se rassemblent.  Dans la nuée de leur tourbillon, moi, point fixe, je précise les pensées qui mèneront à mon anéantissement.  Si ma mort vient naturellement je m'en réjouirai, mais je n'aurai sans doute pas cette chance et il me faudra la hâter.  Pourtant, un quelque chose m'arrête et délaie indéfiniment la pression de la gachette.  Il s'agit de ce mystère qui fait la série de ma vie, conçue comme infinie sommation d'événements-unités.  Ce mystère, je dois le percer.  Je dois comprendre la succession des causes et des effets qui a mené à une histoire à ce point sordide, éclairer le tohu-bohu confus de cette existence unique, et, quand je l'aurai fait, unifié enfin avec le monde, je pourrai appeler de mes vœux le dernier impact. »

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